Entre le chaud et le froid la perplexité (suite et fin)
Et ceux qui pensent, comme Jack Barrett de l'Imperial Colloge à Londres
qui lui aussi a une théorie qui contredit les prévisions, que "si
toutes les réserves de combustibles fossiles connues de la
planète brûlaient, on verrait alors une prolifération de la
végétation, et non un réchauffement atmosphérique
spectaculaire" (sic).
Ce à quoi répond Phil Jones : "Pour ce qui est du problème
du CO2 et du réchauffement planétaire, j'aurais tendance à
partager l'avis général de l'IPCC, plutôt que le point de
vue personnel de Jack Barrett".
Mais, la théorie dominante reste malheureusement la plus plausible pour
la majorité des scientifiques - on aimerait bien donner raison à
ce scientifique qui croit à une "prolifération de la
végétation" et non à l'augmentation de la
température.
Cette polémique souligne un fait : les scientifiques sont moins
sûr qu'auparavant, on ne peut pas se fier aux prédictions, les
tentatives de modélisations du climat n'ont pas abouti, on
connaît, par exemple, encore trop mal le cycle du carbone dans
l'atmosphère. Par contre un des mauvais effets de cette polémique
c'est qu'elle alimente le moulin de ceux qui, comme les pays de l'OPEP, pensent
qu'avant d'entreprendre quoi que ce soit, il faut destabiliser les
prévisions officielles. Un lobby contre l'écologie, extrait de Sciences et Avenir
ET SI LE CLIMAT CHANGEAIT BRUTALEMENT ET NON PROGRESSIVEMENT ?
On peut dire que cela se complique, d'autant plus que les grandes
périodes climatiques "chaudes" et glaciaires, ne seraient pas stables
comme le croyaient les scientifiques. On commence à connaître,
grâce à l'analyse des carottes glaciaires, le climat de
l'Atlantique Nord des 200 000 dernières années. On s'interroge
encore sur les périodes interglaciaires comme celle que nous vivons.
Une récente découverte révèlerait qu'une
époque glaciaire pourrait avoir une période chaude. Inversement,
au sein d'une époque chaude des coups de froid seraient possibles d'une
durée de quelques décennies ou de plusieurs siècles. En
bref, sommes-nous dans un épisode chaud d'une période froide, ou
dans une phase froide d'une période chaude ?
LES GAZ QUI CONTRIBUENT à L'EFFET DE SERRE
Contrairement à ce que l'on pourrait croire le CO2 n'est pas le
principale gaz à effet de serre, il est certes émis en grande
quantité mais d'autres gaz ont des effets tout aussi destructeur :
- les émissions de CO2 représente 50% de l'effet de serre. ils
proviennent entre autre de la combustion de carburants fossiles - essence,
charbon, etc.
- Le méthane y contribue pour 15 % alors que ses rejets sont 120
inférieurs à ceux du CO2; Ce gaz est émis par les
rizières, les décharges, le bétail, ainsi que par des
fuites dans les gazoducs;
- les CFC pour leur part y contribue pour 24%, avec des émissions
pourtant 70 000 fois plus faibles. Chaque molécule de CFC contribue
à l'effet de serre comme 10 000 molécules de gaz carbonique.
Chaque année la combustion de carburants fossiles entraîne une
émission d'environ 5,7 milliards de tonnes de CO2.
L'académie des Science estime, dans un rapport publié en novembre
dernier, que nous ne pourrons déverser indéfinement,
jusqu'à la moitié ou la fin du siècle prochain, autant de
gaz à effet de serre dans l'atmosphère "sans que des
conséquences sur les climats ne fassent jour".
Le groupe d'études intergouvernemental sur le changement climatique
(IPCC, Intergovernmental Panel on Climate Change) a confirmé en
septembre que la capacité de l'atmosphère à absorber et
à émettre de l'énergie est en train de se modifier sous
l'action des gaz à effet de serre émis par l'homme. Dans son
rapport final l'IPCC à notamment revu en hausse l'effet chauffant du
méthane.
LES TERRES FERTILES SERAIENT DÉPLACÉES
S'il y a un réchauffement climatique que se passerait-il ? Si
l'émission de gaz à effet de serre se poursuit au rythme actuel,
dans les 50-100 ans à venir la température augmenterait de 2
à 4 deg.C. Les zones climatiques pourraient se déplacer de
plusieurs centaines de kilomètres de l'équateur en direction des
pôles (exemple la Sibérie deviendrait un région agricole
fertile).
La calotte glaciaire se mettrait à fondre et on estime que le niveau de
l'océan pourrait s'élevé de 65 cm à un mètre
en un siècle, menacant ainsi les 3 milliards de personnes qui vivent au
bord de la mer ou à moins de cent kilomètres.
Exemple : le tiers des Pays-Bas serait inondé, ainsi qu'un groupe de
petites îles comme les Maldives, les Bahamas, Trinité et Tobago,
les Fidji, etc, grande partie du Bangladesh, de l'Indonésie et du
Sud-Est asiatique, où se trouvent aujourd'hui, les terres les plus
fertiles.
L'écosystème serait incapable de s'adapter, et la disparition de
la flore et la faune pourrait s'accélérer. La productivité
agricole subirait un inquiétant déclin, dans certaines
régions du monde : le Brésil, la région du Sahel en
Afrique, l'Asie du Sud-Est et la Chine. Et tout ceci entraînerait de
graves problèmes concernant les ressources en eau, en particulier dans
les régions semi-arides et dans les zones humides.
Avec aussi l'asséchement des zones irrigués par la fonte des
glaces, et pénétration de l'eau salée plus en avant dans
les lits des fleuves permettant à celle-ci de s'introduire dans les
nappes phréatiques.
LE RÉCHAUFFEMENT POURRAIT ENTRAÎNER L'EXPLOSION DE MALADIES
TROPICALES
Selon un récent article paru dans Science (traduit par le
Courrier International 9/03/95) de plus en plus de chercheurs pensent que le
réchauffement pourrait entrainer l'explosion de plusieurs maladies
tropicales, principalement dû à l'élargissement de la zone
d'action des insectes.
Une migration de moustiques porteurs de paudismes et d'autres maladies issus de
l'Amérique centrale pourrait s'abattre sur les Nord-Américains.
Résultat, l'explosion de ces maladies pourrait provoquer chaque
année des centaines de milliers de décès
supplémentaires.
(À suivre fin mars l'IPCC éditera la version
révisée de son rapport de 1990 qui pour la première fois
intégrera un chapitre sur les impacts sanitaires de ce changement.)
Si en vingt ans (de 1970 à 1990) le coût des inondations a
été d'environ 50 milliards de dollars, selon les assureurs le
coût mondial des catastrophes naturelles en 1994 a dépassé
les 250 milliards de dollars. Les compagnies d'assurances ont surveillé
de près le Sommet de Berlin, les catastrophes naturelles
représentent de grandes pertes pour elles, et le contre-coup se fait
déjà sentir. Certaines compagnies refusent déjà
d'assurer les biens qui se trouvent dans les Caraïbes ou dans le Pacifique
qui sont des zones à risques.
LE MONDE EST UN VASTE ORGANISME
Notre écosystème est un ensemble extrêmement complexe de
processus. Avant de prévoir les évolutions du climat, les
scientifiques doivent non seulement comprendre les mécanismes chimiques,
dynamiques et radiatifs, mais aussi les interactions entre tous ces
processus.
En science, on considérait jusqu'ici que le "tout est la somme des
parties". Une nouvelle conception émerge selon laquelle "le tout est
quelque chose de plus que la somme de ses parties". Le monde ne serait plus un
gigantesque mécanisme, mais un vaste organisme. Serait-ce ce que nous
sommes en train de découvrir pour le climat ?
Même si le réchauffement planétaire est aujourd'hui remis
en cause, d'autres problèmes comme la réduction de la couche
d'ozone sont déjà très inquiétants. Donc à
l'interrogation : y a-t-il un changement climatique ? La réponse est oui
! Dans quel sens ? Là est la question.
À la lecture de ces lignes on peut se demander : mais que font les
gouvernements ? Formulons cela en des termes plus proches de nous : mais que
fais-je ? Il est évident que s'interroger soi-même est moins
simple... En y réfléchissant, on se dit que de manière
abstraite on aimerait que les choses changent mais que concrétement, on
ne veut pas adopter un autre mode de vie. Voilà, peut-être le hic
!
Les incertitudes et les polémiques ne doivent pas nous détourner
d'un fait : Il faut reconsidérer notre système de
société de manière globale. Nous savons qu'il y a des
mesures à prendre collectivement et individuellement, que même si
nous réduisons notre production de CO2 ou de CFC, nos industries et
chaque-un de nous continuons à polluer, l'eau, l'air et la terre. Nous
ne devons pas attendre des scientifiques, une solution miracle.
NOUS SOMMES CHAQUE-UN MIS FACE À NOS RESPONSABILITÉS
Des changements radicaux doivent être donc entrepris, et ils auront
d'importantes retombées sur la population. Soit la modification de notre
mode de vie est décidée d'un commun accord entre les politiques
et les citoyens; soit il est à craindre que les événements
nous l'imposent et peut-être de façon violente.
Serions-nous, à l'instar des habitants de Los Angeles, en attente d'un
global Big One ? Lorsque les prévisions climatiques seront
exactes, peut-être il sera par contre, trop temps pour inverser le
processus...
C'est à nous de choisir. Le système "Terre" nous ferait-il des
signes ? L'actualité récente nous rappelle que face aux
catastrophes naturelles, inondations, tremblements de terre,
épidémies, sécheresses, les hommes restent encore
démunis.
Nous ont servi pour cette enquête :
"L'État des
Lieux", fascicule de chiffres bruts sans commentaires, traduction du
rapport "L'État de l'environnement de 1972 à 1992",
édité par les Humains Associés. Bientôt disponible
sur ce web!
Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement édite
régulièrement des documents. Adresse du serveur à Nairobi
: gopher://unep.no:70/
"L'Affaire du trou dans la couche d'ozone", enquête publiée par
Greenpeace France.
"Quelques faits sur l'environnement, de Conscience Globale en Action", in
Gaïa Bleue Blues, troisième édition des Humains
Associés, en 1990. Prochaînement disponible sur le web !
Natacha QSF (ha_nat@iway.fr)
|