Real-life Avatar, seuils de rupture, pastoralisme en Afrique, Galápagos
Revue de liens hebdomadaire reprenant les infos les plus pertinentes diffusées par Twitter par l’équipe des Humains Associés. Chaque jour, nous partagerons des liens de sources diverses. Cette semaine, la revue de lien est consacrée à l’appel d’un peuple autochtone au réalisateur d’Avatar, aux seuils de rupture climatiques, aux avantages du pastoralisme en Afrique, aux causes réelles de la déforestation et à la migration d’une population de lions de mer des îles Galápagos.
Avatar : un scénario bien réel pour la tribu des Dongria Kondh en Inde
L’histoire des Dongria Kondh, un peuple autochtone de la région d’Onissa dans l’est de l’Inde, ressemble à s’y méprendre au scénario d’Avatar du réalisateur américain James Cameron. Comme les Na’vis d’Avatar qui cherchent à protéger leurs terres contre l’exploitation minière, les Dongria Kondh sont menacés d’expropriation par une compagnie britannique, Vedanta Ressources, qui vise la bauxite de leurs montagnes. Les Dongria Kondh tirent leur identité culturelle des collines de Niyamgiri, qui leur fournissent leur nourriture, l’eau dont ils ont besoin et leurs moyens de subsistance. Ils considèrent ces collines comme sacrées et les vénèrent à travers des prières et offrandes quotidiennes : « S’ils détruisent ces montagnes, nous allons mourir. Nous perdrons notre âme. Niyamgiri est notre âme. »
Le géant minier britannique Vedanta Resources, détenu par Anil Agarwal, un milliardaire indien, a déjà implanté une usine dans la vallée pour transformer la bauxite en aluminium. Suite au feu vert de la Cour suprême indienne en août 2008, l’exploitation de la mine dans la montagne doit démarrer cette année et faire tourner l’usine à 100%. L’entreprise promet à la population des infrastructures médicales, des écoles et des terres pour se reconvertir à l’agriculture dans cette région très pauvre. Mais selon Amnesty International, l’usine inaugurée par Vedanta Resources en 2006 aurait déjà commencé à polluer l’eau et l’air, menaçant la santé des habitants, sans qu’aucune mesure de gestion des déchets et de surveillance médicale ne soit prise.
Comme le souligne Amnesty International, « Vedanta et ses filiales n’ont pas respecté les normes internationalement acceptées relatives aux conséquences des activités des entreprises sur les droits humains, qui prévoient l’obligation d’informer et de consulter la population et d’améliorer les projets afin de ne pas porter atteinte à ses droits.» Et au fur et à mesure que la résistance s’organise, les membres de la tribu sont victimes de menaces et d’intimidations. Mais comme en témoigne la vidéo, les Dongrias sont prêts à payer le prix fort pour protéger leurs montagnes.
Au nom des Dongria Kondh, l’ONG Survival International, qui défend les peuples indigènes, a lancé un appel à James Cameron à travers un encart publié par le magazine américain Variety en février : « Avatar est une fiction… bien réelle. En Inde, la tribu des Dongria Kondh lutte pour défendre sa terre contre une compagnie minière qui s’apprête à détruire sa montagne sacrée. Venez en aide aux Dongria Kondh. » « Nous avons vu votre film – maintenant, visionnez le nôtre !»
Stephen Corry, directeur de Survival International, explique : « De même que pour les Na’vi qui décrivent la forêt de Pandora comme ‘leur tout’, pour les Dongria Kondh, la vie et la terre ont toujours été profondément liées. Le drame d’Avatar – si l’on fait abstraction des lémuriens multicolores, des chevaux à longues trompes et des guerriers androïdes – se joue aujourd’hui sur les collines de Niyamgiri en Orissa. […] J’espère que James Cameron soutiendra les Dongria dans leur combat pour protéger leur montagne sacrée et garantir leur avenir.» (Lire les articles ici et ici, voir la vidéo. Signer la pétition d’Amnesty International)
Les scientifiques alertent sur les seuils de rupture climatiques
Une étude internationale conduite par plusieurs scientifiques a évalué les effets de seuils dans le domaine climatique. Un seuil de rupture est défini comme le point à partir duquel une légère augmentation de température ou un autre changement dans le climat peut déclencher un changement disproportionné voir un effet d’emballement sur l’ensemble du système. Ainsi, le réchauffement climatique peut conduire à des ruptures irréversibles dans les caractéristiques géophysiques des écosystèmes, résultant dans des changements dramatiques et soudains. La plupart des scénarios risquent d’être irréversibles à échelle humaine. Une fois que le seuil est dépassé, plusieurs générations subiront les effets d’une transition vers le nouvel état.
Pour les neuf scénarios étudiés, les scientifiques estiment qu’un certain nombre de ces points de rupture sont proches, tels que la disparition de la glace en Arctique l’été, devenue quasi inévitable. D’autres, telle que la disparition des forêts boréales, inadaptées aux températures plus chaudes, se joueront sur plusieurs décennies. Parmi les seuils de ruptures étudiés figurent aussi la fonte de la glace au Groenland et celle de la partie ouest de l’Antarctique, cette dernière risquant de se produire de façon abrupte une fois en contact avec l’eau plus chaude de l’océan, avec pour conséquence l’augmentation du niveau de la mer. Le Gulf Stream, garant des températures clémentes en Europe, risque de ralentir, bien que peu de scientifiques envisagent son arrêt total. La mousson en Inde dépend des différences de températures entre la terre et la mer, les changements de températures l’affectent fatalement, avec des conséquences sur les millions de personnes, de même pour la mousson d’Afrique de l’Ouest. La forêt amazonienne risque elle aussi d’être atteinte dans son équilibre interne par les effets combinés de la déforestation et du réchauffement.
Des modélisations mathématiques de scientifiques de l’université de Californie indiquent de surcroît que ces points de bascule n’ont pas toujours leurs signes avant-coureurs : ainsi, une population de plantes ou d’animaux peut s’effondrer de façon subite, dès que les conditions de son écosystème ont été modifiées. « Cela signifie que certains effets du changements climatique sur les écosystèmes ne pourront être vus que suite à leurs conséquences dramatiques. A ce stade, un retour en arrière vers un état plus souhaitable sera difficile, sinon impossible », explique le professeur Alan Hastings.
« Nos résultats montrent qu’un grand nombre de points de bascule risquent d’être atteints ce siècle sous l’influence du changement climatique créé par l’homme », indique le professeurr Timothy Lenton de l’université d’East Anglia. «Néanmoins, la plupart peuvent encore être évitée par la réduction des gaz à effets de serre. Mais, ajoute-t-il, nous devrions nous préparer à l’adaptation. » (Lire les articles ici et ici, en anglais, et ici, en allemand)
Des millions d’hectares de terres traditionnellement utilisées par les bergers nomades en Éthiopie, au Sénégal, au Mali, au Tchad, au Kenya et dans d’autres pays subsahariens, ont été perdus au profit d’éleveurs sédentaires, selon l’étude Modern and Mobile, publiée par l’International Institute for Environment and Development (IIED). La progression inexorable de fermes familiales et de grandes exploitations agricoles, combinée aux mesures de protection des terres pour la faune sauvage ou comme réserves de chasse, réduit la mobilité des éleveurs nomades et conduit à de nombreux conflits. « La mobilité est maintenant un problème sérieux. L’accès à l’eau et aux marchés est toujours plus difficile et menace la rentabilité de l’élevage extensif. L’augmentation de la pauvreté, la dégradation des ressources et des conflits en seront la conséquence. »
En encourageant un modèle agricole à l’occidentale, les gouvernements espèrent un rendement plus important, à la fois pour le marché local et les exportations. Mais le contraire s’avère être vrai. L’étude de l’IIED montre que les 50 millions d’éleveurs nomades s’adaptent rapidement au monde moderne. Ils téléchargent les cours du marché sur leurs téléphones mobiles, rejoignent leurs troupeaux sur des motos chinoises peu chères et transportent leur bétail sur des milliers de kilomètres à pied, par camions ou bateaux pour le commerce international.
« On a la perception d’un mode de vie archaïque et dépassé, mais ils sont totalement intégré dans un processus global », indiquent les auteurs. L’étude montre que les troupeaux de l’Afrique de l’ouest produisent une viande de meilleure qualité et génèrent plus de profit au km carré que les troupeaux d’élevages sédentaires d’Amérique et d’Australie. Alors que ceux-ci sont spécialisés uniquement dans la viande, les troupeaux des éleveurs africains sont utilisés pour leur viande, mais aussi le lait, le sang, le fumier et comme moyen de transport. De surcroît, le pastoralisme représente une forme plus durable de l’élevage. Avec leur connaissance approfondie du terrain, les bergers se déplacent en fonction des aires de pâturages, et exercent une pression moindre sur les ressources d’un même lieu. Le pastoralisme cohabite plus facilement avec la faune et la flore sauvage et s’adapte plus facilement aux conditions climatiques extrêmes, tels que les sécheresses, alors que les fermes sédentaires en sont fatalement les victimes.
Les auteurs préconisent vivement une réévaluation et la protection du pastoralisme, vu à tort comme contraire au développement des pays africains. Les besoins financiers pour sa protection seraient peu importants, mais les bénéfices dépasseront rapidement les seuls bergers et leurs communautés pour enrichir la vie de millions de personnes en Afrique. (Lire l’article ici, en anglais)
L’urbanisation et les exportations agricoles, principales causes de la déforestation
La déforestation dans les pays tropicaux a pour principales causes l’urbanisation et les exportations agricoles, révèle une étude de chercheurs de l’Earth Institute de l’université de Columbia, publiée dans Nature Geoscience. Ce constat va à l’encontre d’une idée reçue qui considère que la forêt est victime des populations rurales et des petits propriétaires terriens et qu’il suffirait pour la protéger de les inciter à ne plus déboiser.
Ce principe était valable jusqu’au 20e siècle, où en effet le moteur principal de la déforestation était la croissance de la population rurale qui défrichait les forêts pour acquérir de nouvelles terres arables et construire de nouvelles routes. Mais alors que l’on assiste désormais au phénomène inverse, l’exode rural, et qu’en 2009, la population urbaine atteint pour la première fois 50% de la population mondiale, la déforestation ne s’est pas réduite. L’étude montre que les moteurs du défrichement ont changé et les chercheurs avertissent que les politiques actuelles de lutte contre le déboisement se trompent de cible et « ne répondront pas, à l’avenir, à la principale cause de la déforestation ».
De 2000 à 2005, l’équipe de l’Earth Institute a comparé l’évolution de la couverture forestière d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie, à l’aide de photos satellites, aux tendances démographiques et économiques de 41 pays. L’analyse statistique de ces données a révélé que les forts taux de déforestation en zone tropicale sont corrélés avec la croissance des villes et, en Asie particulièrement, la croissance des exportations agricoles. L’accroissement du niveau de vie, et donc des besoins, des populations urbaines par rapport aux populations rurales, ainsi que la forte demande internationale en produits agricoles, notamment des biocarburants, seraient donc les principales causes de la destruction des forêts. Deux facteurs qui risquent de se renforcer encore dans les années à venir, l’ONU prévoyant qu’en 2050, les deux tiers de la population mondiale sera urbaine.
Une bonne compréhension des mécanismes à l’œuvre est d’autant plus importante que la protection des forêts devient un enjeu climatique international. Leur importance comme puits de carbone et arme efficace dans la lutte contre le réchauffement climatique a été reconnue et une part significative des fonds de Copenhague doit aller à leur protection. (Lire les articles ici et ici)
Galápagos : La migration d’une colonie de lions de mer témoigne du changement climatique
Des scientifiques en biologie marine ont rapporté qu’une colonie de lions de mer des Galápagos s’est établie sur l’île de Foca sur les côtes du Pérou, à 1450 km au sud-ouest de l’archipel. C’est la première fois qu’une telle migration a été observée pour une colonie entière et que cette espèce endémique aux Galápagos abandonne son territoire habituel. Pour les scientifiques de l’organisation péruvienne de recherche sur les animaux aquatiques, cela témoigne de l’adaptation des animaux au changement climatique. Ils ont pu montrer que la température des eaux autour de l’île de Foca est passée de 17 à 23 C° au cours des dix années passées et correspond désormais à celle des Galápagos.
Les îles Galápagos sont inscrits au patrimoine naturel de l’humanité de l’UNESCO depuis 1979. La flore et la faune y sont uniques au monde et l’archipel, qui a inspiré les travaux de Charles Darwin, est réputé être un laboratoire vivant de l’évolution. Les lions de mer et les otaries des Galápagos sont deux espèces de mammifères marins indigènes spécifiques aux Galápagos. (Lire l’article ici, en anglais)
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