Forêt amazonienne, disparition des langues, Pentagone, Tibet
Revue de liens hebdomadaire reprenant les infos les plus pertinentes diffusées par Twitter par l’équipe des Humains Associés. Chaque jour, nous partagerons des liens de sources diverses. Cette semaine, la revue de lien est consacrée au point de bascule presque atteint pour la forêt amazonienne, à la disparition d’une tribu des îles d’Adaman et à travers elle d’une des plus anciennes langues du monde, à la prise en compte du réchauffement climatique dans la stratégie du Pentagone, aux températures records au Tibet et à la protection du Lac Tchad via la Convention Ramsar.
La forêt amazonienne près du point de bascule
Selon un rapport de la Banque mondiale, la forêt amazonienne est proche d’un point de bascule qui pourrait mettre en péril l’ensemble de l’écosystème. La combinaison de la déforestation, des feux et de la hausse des températures pourrait dévaster l’écosystème d’ici 65 ans et le réduire à un tiers de sa surface originelle. Cette réduction aura pour effet l’extinction d’innombrables espèces, la perte de ressources en eau, la réduction des précipitations dans toute la région et l’affaiblissement du puits de carbone le plus important du monde. Dans la mesure où la forêt produit au moins la moitié de ses précipitations elle-même, la réduction de sa surface et un assèchement accru enclencheront une boucle de rétroaction qui risque de transformer de larges régions en savane. Le processus libérera des millions de tonnes de carbone supplémentaire dans l’atmosphère.
Alors que l’on est près de 17-18% de surface détruite, Thomas Lovejoy, conseiller en biodiversité à la Banque mondiale, indique que le point de bascule pourrait se situer aux alentours 20% de déforestation. Sans mettre en doute le risque d’un effondrement du système hydro-géologique, d’autres études considèrent que le seuil critique serait atteint avec 40-60%, mettant en lumière la difficulté de ce type de modélisations. La force de l’étude de la Banque mondiale réside dans la prise en compte des trois facteurs combinés, déforestation, feux de forêts et augmentation de la température. Une troisième étude souligne que l’écosystème tropical ne peut exister qu’avec 1,5 mètre de pluie par an. Si les précipitations diminuent, l’impact sur la forêt est inévitable. L’ensemble des études sont en ligne avec le rapport du GIEC (dont les affirmations ont récemment été mises en cause), qui a mis en garde contre un assèchement de la forêt suite au réchauffement et qui entraînerait une réduction de 40% de l’écosystème amazonien. (Lire l’article ici, en anglais)
Disparition de la dernière membre d’une tribu des îles d’Adaman
Âgée de 85 ans, Boa Sr, dernière représentante de la tribu Bo, s’est éteinte début février. Les Bo ont vécu sur les îles d’Adaman, un archipel du Golfe de Bengale, depuis plus de 65 000 années et sont considérés comme une des plus anciennes cultures du monde. Le peuple grand-andamais, dont faisaient partie les Bo, ne compte plus que 52 personnes, alors qu’ils étaient encore près de 5 000 au moment de l’arrivée des colons britanniques en 1858. A leur arrivée, la plupart sont morts tués ou victimes de maladies, nouvelles sur ces îles isolées pendant des millénaires. De nos jours, les survivants dépendent des aides du gouvernement indien pour leur survie. Touchés par le Tsunami en 2004, la plupart ont néanmoins pu se réfugier sur les hauteurs des îles, alarmés à temps par les signes de la nature.
Boa Sr était également la dernière personne à savoir parler la langue de cette tribu, considérée elle aussi comme une des langues les plus vieilles du monde. Le professeur de linguistique Anvita Abbi a bien connu Boa Sr: « Comme elle était la seule personne qui parlait encore le Bo, elle se sentait très seule, n’ayant personne pour parler avec elle. Elle avait beaucoup d’humour et son sourire et ses rires étaient contagieux. » Pour l’ONG Survival, « avec la mort de Boa Sr et l’extinction de la langue Bo, une part unique de la société humaine n’est plus qu’un souvenir. La disparition de Boa est un triste rappel que nous devons tout faire pour que la même chose n’arrive pas aux autres tribus grand-adamais. »
Cette disparition met une fois de plus en lumière la tragédie de la disparition des langues. Pour K. David Harrison, auteur du livre « The last speakers » [Les derniers locuteurs], le destin des langues est semblable et intimement lié à celui des espèces. Tout comme 80% des plantes et animaux sont inconnus de la science, 80% des langues demandent encore à être documentées. Mais si les espèces sont inconnues de la science officielle, elles sont présentes dans les langues locales, qui non seulement les nomme, mais les prend en compte dans leurs interactions complexes. Les Kallawaya de Bolivie et leur connaissance des plantes médicinales, les Yupiks de l’Alaska qui ont 99 noms pour les formations de glace, la classifications des rennes par les Tofalars de Sibérie, sont quelques exemples du savoir que contiennent les langues anciennes et qui disparaît au profit des langues globalisées. Les langues documentent comment nos ancêtres ont calculé de façon précise le passage des saisons sans montres ni calendriers, comment les humains se sont adaptés à des environnements hostiles, de l’Arctique à l’Amazonie. La langue contient toute l’ingéniosité humaine, le savoir transmis à travers des générations, les mythes et rituels qui célèbrent et interprètent notre existence.
Face à la menace qui pèse sur la diversité des langues, les linguistes ont identifié des hauts lieux linguistiques et se mobilisent pour leur sauvegarde à l’aide des nouvelles technologies. Pour K. David Harrison, ce que les peuples indigènes savent à travers leurs langues – ce que nous avons oublié ou n’avons jamais su – pourrait un jour nous sauver. Il nous invite à écouter ces voix, partageant le savoir dans 7000 façons de parler différentes, avant qu’il ne soit trop tard. (Lire les articles ici et ici, en anglais)
Dans sa revue quadriennale, le Département de la défense américain a classé pour la première fois le réchauffement climatique parmi les forces déstabilisatrices menaçant l’équilibre mondial. Il a demandé aux responsables militaires de suivre de près les résultats de la science climatique et d’intégrer ce facteur dans ses plans stratégiques. Si le changement climatique à lui tout seul ne cause pas de conflits, il peut jouer le rôle d’un accélérateur de l’instabilité et des conflits et risque de rajouter un poids supplémentaire sur les institutions civiles et militaires à travers le monde. Selon une analyste du Centre for a New American Security, le Pentagone considère maintenant le réchauffement climatique comme « un problème relevant de la sécurité nationale. Au même titre que les facteurs politiques et économiques, c’est un facteur qui façonne notre monde. »
Signe que le réchauffement inquiète le Pentagone, la CIA a créé un centre de recherche sur le climat et a relancé un programme, abandonné par George Bush, qui permet de partager les images satellites des glaciers et de l’Arctique avec les scientifiques. Des officiels de la CIA ont également sollicité les experts scientifiques pour connaître leur point de vue sur l’impact du changement climatique sur le monde et suivre les actions des pays pour réduire les gaz à effets de serre.
Les conséquences du réchauffement sur l’institution militaire elle-même sont déjà nombreuses : Les vagues de chaleurs et les tempêtes multiplient les interventions humanitaires des militaires. Le changement de l’équilibre chimique des océans perturbe les sonars des sous-marins. Plus de 30 bases militaires américaines se situent près des côtes et sont menacées par la hausse du niveau des mers. La fonte des glaces dans l’Arctique et l’ouverture du passage du Nord-Ouest créent un nouvel enjeu sécuritaire. Et la dépendance au pétrole rend les militaires particulièrement vulnérables aux attaques sur les convois dans des pays tels que l’Irak et l’Afghanistan. Malgré cela, tous les membres de l’armée ne sont pas en phase, l’institution comportant elle aussi son lot de climato-sceptiques. Néanmoins, la sous-secrétaire à la défense, Dorothy Robyn, promet une réduction des émissions liées à des opérations non militaires de 34% d’ici 2020. (Lire l’article ici, en anglais)
Climat : température record au Tibet l’année dernière
La température du Tibet a atteint des niveaux records l’année dernière, selon l’Agence Chine Nouvelle et des chiffres obtenus à partir de 38 observatoires différents. Avec une moyenne proche de 6 degrés, la température est de 1,5 degré au-dessus de la normale. Le Tibet, en raison de son altitude, est particulièrement sensible au réchauffement climatique. Depuis le début des prélèvements dans les années 60, la température augmente de 0,32 degré Celsius tous les 10 ans.
Les montagnes du Tibet, à plus de 4 000 mètres d’altitude, sont les lits, entre autres, du Gange, du Brahmapoutre, de l’Indus, du Yangtze, du Fleuve jaune et du Mékong. La fonte des glaciers de l’Himalaya fait l’objet d’une controverse, la date indiquée dans le dernier rapport du GIEC, 1935, s’avérant peu fondée. Néanmoins, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) maintient les conclusions générales du rapport, indiquant une accélération de la fonte des glaciers de l’Himalaya, des Andes et de l’Hindu-Kush, avec des conséquences dévastatrices pour les populations. Plus d’un sixième de la population mondiale vit dans des régions irriguées par les eaux des fontes des glaces et en dépend pour sa survie. (Lire l’article ici)
La protection du Lac Tchad selon la Convention Ramsar
La Journée mondiale des Zones Humides le 2 février a été l’occasion pour le Cameroun de reconnaître le Lac Tchad comme zone humide d’importance internationale, selon la Convention Ramsar. La Convention sur les zones humides d’importance internationale, appelée Convention de Ramsar, est un traité intergouvernemental pour la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources. Adopté dans la ville iranienne de Ramsar, en 1971, il est le seul traité international portant sur un écosystème en particulier et couvrant toutes les zones géographiques de la planète.
Le Cameroun est ainsi le dernier des quatre pays limitrophes du lac Tchad à signer la Convention, après le Niger et le Tchad en 2001 et le Nigeria en 2008. Le lac devient ainsi le 13e site Ramsar transfrontalier et seulement le 2e en Afrique. La signature ouvre la voie pour une protection et gestion commune de l’écosystème et des ressources. La zone protégée couvre désormais 2,6 millions d’hectares. La région est une des destinations les plus importantes des oiseaux migrateurs d’Europe et d’Asie, qui s’y arrêtent après leur traversée du Sahara. Il est également l’habitat d’espèces menacées tels que les crocodiles du Nil, les hippopotames, ainsi qu’éléphants, gazelles et loutres.
Le lac est vital pour plus de 20 millions de personnes qui en dépendent pour l’eau, la pêche et l’agriculture. Il est menacé par les conséquences du changement climatique, l’assèchement et la désertification et une mauvaise gestion des ressources en eaux et du poisson. Jadis un des plus grands lacs du monde, sa taille a diminué de façon drastique sur les 40 dernières années, suite à des projets d’irrigations massifs et une baisse continue des précipitations depuis les années 1960. Sa surface avoisinait les 25 000 km2 dans les années 60, il est passé à près de 3000 km2. L’assèchement du lac menace les moyens d’existence des riverains. Toutes les activités socio-économiques s’en trouvent affectées et la surexploitation des ressources en eau et en terre entraîne conflits et migrations. Elle fait craindre une véritable catastrophe humanitaire à la FAO. (Lire l’article ici, en anglais)
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