Entre l'envol et la chute
(vers une fédération planétaire)
Tatiana F.
Le libre
arbitre est notre seule vraie richesse et, de ce fait, il doit être considéré
comme inviolable. Imposer quoi que ce soit est un crime contre l'humanité,
contre nature, contre conscience. Il ne peut s'agir que de proposer, d'inviter
au partage. Ce qui est vérité pour l'un ne l'est pas forcément
pour l'autre. L'échange des idées et des points de vue ne peut
que nous enrichir mutuellement, mais pour cela il est une condition sine
qua non : le respect réciproque. Ce sont toujours les "idées
insolites" qui ont fait avancer la culture humaine, aussi bien dans l'histoire
de la science que celles de l'art, de la philosophie, de la psychologie et même
des religions.
L'utopie d'hier est l'ordinaire d'aujourd'hui. Le fait qu'une idée
soit prématurée ne signifie pas qu'elle ne soit pas réalisable
un jour futur. Dans notre civilisation, avoir l'esprit ouvert, c'est-à-dire
sans préjugés, est assez rare, non pas parce que l'intelligence
en est absente, mais par conformisme socio-psychologique qui veut que l'on soit
en accord avec la majorité, faute de quoi on risque de subir l'exclusion
du groupe. Notre horizon mental est proportionnel à notre champ de vision,
et nous savons tous que nous avons la vue - et la vie - courte. Comme la limite
des yeux crée l'horizon, seul l'élargissement de notre compréhension
peut nous apprendre que plus nous marchons vers l'horizon, plus il s'éloigne.
Exclure de notre champ de vision mental tout ce qui le dépasse, sous
prétexte que l'on ne voit pas, c'est nous maintenir nous-mêmes
derrière les barreaux limités de notre propre prison, c'est être
son propre bourreau, en quelque sorte. Ce que je veux signifier par là,
c'est qu'il ne s'agit ni d'affirmer, ni d'infirmer, mais d'accepter les "propositions
insolites" comme hypothèses de travail et d'aller voir par soi-même
si oui ou non, si oui et non, cela est envisageable dans un futur proche, et
de le démontrer arguments à l'appui. L'absence de preuves n'a
jamais constitué une preuve d'absence. Nous pensons que malgré
notre haute technologie, nous demeurons psychologiquement égocentriques,
géocentristes, anthropocentristes et nationalistes primaires de surcroît.
Or, depuis le jour mémorable du 24 juillet 1969, où nous avons
aperçu sur nos écrans l'image du vaisseau spatial Gaïa
bleue blues, nous savons que celle-ci est un corps astronomique indivis
et que nous sommes tous, sans exception, des voyageurs à son bord; plus
jamais - me suis-je dit - les hommes ne se verront séparés et
différents les uns des autres. Hélas ! 1010 mille fois
hélas ! cette attitude d'exclusion et de blocage psychologique est toujours
de mise.
Aujourd'hui, du moins en Occident, nous avons: d'un côté une
science qui nous apprend que notre galaxie est une ruche de cent milliards d'étoiles
dans un univers observable où il existe environ cent milliards de galaxies
semblables à la nôtre, avec des dimensions chiffrées en
milliers d'années-lumière et où pour notre seule galaxie
apparaît le nombre vertigineux de cent mille années-lumière
de diamètre (une année-lumière = 10 000 milliards km),
et de l'autre côté une mentalité sectaire, tribale - à
quelques exceptions près.
Pour la plupart, nous vivons pour le panem et circenses, malgré
toutes les informations que nous avons sur l'empire romain et sur l'une des
causes majeures de sa chute. Les civilisations sont mortelles, elles aussi,
et la nôtre se meurt, pendant que la nouvelle est déjà en
gestation au sein même de l'actuelle.
Et pendant ce temps-là, notre monde présente une face de plus
en plus uniforme, internationalisée par l'économie, les sciences,
les mass-média et les toutes puissantes transnationales qui règnent
en despotes quasi-absolus et pour lesquelles tout est permis.
Et pendant ce temps-ci, ces mêmes puissances nous disent l'impossibilité
de réaliser l'unité dans la diversité, c'est-à-dire
l'union de la grande famille fraternelle et humaine, en nous étiquetant
d'irréalistes, et selon les latitudes de fauteurs de troubles, c'est-à-dire
de dangereux individus. Implicitement, "cartésiennement", tout est fait
pour que nous n'ayons plus de but en commun, plus d'idéal à partager,
alors voilà quelques-uns des résultats: par excès de matérialisme,
nous sommes en train de nous effondrer, de nous étouffer lentement mais
sûrement.
Faute d'idéal humain véritable, notre indifférence nous
mène droit à la destruction de notre planète et à
l'autodestruction. Certes, nous voyons apparaître des tentatives communautaires
en Amérique du Sud, en Amérique du Nord, en Europe, mais tout
en essayant de rester ouverte et de ne pas jeter le bébé avec
l'eau du bain, je constate qu'il suffit de gratter le vernis économico-démago
pour s'apercevoir que le souci majeur est de faire bloc contre... Communautés
d'exclusion en réalité, ou il se peut que ce soit pour nous un
passage obligé dont nous ne saurions pas nous détourner. Il se
peut...
En face de cela, qu'avons-nous à proposer, tout en prenant en considération
le mercantilisme, l'ignorance, la médiocrité et l'égoïsme?...
L'histoire de l'humanité sur Terre nous a appris que c'est toujours
un petit nombre - à son propre détriment d'ailleurs - qui met
en doute le schéma mental établi comme dogme absolu, qui ose proposer
ce que d'autres - par ignorance et par peurs de toutes sortes, peur du ridicule
et de l'exclusion entre autres - n'oseront jamais.
Alors nous sommes partis à la recherche de ceux qui osent, en leur
demandant de penser avec nous un monde où il n'y aurait qu'une seule
nationalité, et où le respect de la diversité dans la solidarité
serait notre bien commun.
Vers une communauté planétaire, utopie, rêve de fous,
ou recherche nourrie dans l'amour et au nom de l'espérance pour que demain
existe encore ?
Quant à "moi", par extrapolation et aussi par humour (noir ?), je me
plais à demander ce qui arriverait si un jour une civilisation supérieure
à la nôtre établissait le contact avec nous, une civilisation
tellement supérieure que, face à elle, nous nous sentirions comme
des prédateurs barbares quoiqu'impuissants, immuablement figés
dans un âge de pierre révolu. Serions-nous prêts à
nous unir enfin? Certainement, forcément comme dirait M.D., mais je crains
que - comme il en va souvent avec les hommes - il ne soit déjà
trop tard pour le faire, à moins que...
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